Le mécénat est aujourd’hui un outil puissant pour les entreprises, collectivités et administrations. 9 % le pratiquent pour un total de dons de 3,8 milliards d’euros en 2022. Au-delà du geste philanthropique, la politique de mécénat est une stratégie de long terme gagnant-gagnant. Si elle ne promet pas de retour sur investissement direct et immédiat, ses retombées en termes d’image et de réputation sont séduisantes. Qu’est-ce que le mécénat ? Pourquoi le mettre en place dans votre entreprise, collectivité ou administration ? Quelles sont les bonnes pratiques pour une politique de mécénat efficace, pérenne et bénéfique pour votre organisation ? Notre guide pratique.
Qu’est-ce que le mécénat ?
Le mécénat est une forme de partenariat conclu entre une entreprise, une collectivité ou une administration et une personne morale ou physique. Il est accessible à toutes les organisations, quels que soient leur taille, leur activité, leur budget ou leur chiffre d’affaires.
Quel est le principe du mécénat ?
Il n’existe pas de définition légale du mécénat. Selon l’arrêté du 6 janvier 1989 relatif à la terminologie économique et financière, le mécénat consiste à soutenir « une œuvre ou une personne morale pour l’exercice d’activités d’intérêt général ».
Le champ des possibles est vaste. Il s’étend de la culture à l’environnement, en passant par l’éducation, la solidarité, la sauvegarde du patrimoine, le sport, la science, la famille ou le social. Selon le dernier baromètre 2024 de l’expert en mécénat Admical, le mécénat sportif occupe la première place en budget de mécénat, suivi par le mécénat culturel.
À noter que le secteur public est éligible au mécénat d’entreprise. Prés des 2/3 du budget mécénat en France vont à des associations et fondations. Le tiers restant à des structures publiques
Quel est le cadre légal du mécénat ?
Le mécénat se distingue du parrainage (ou sponsoring) par l’absence de contrepartie directe. En échange de son don, une entreprise, administration ou collectivité n’a pas le droit d’exiger une compensation commerciale ou une visibilité médiatique (espaces publicitaires, invitations, stand…)
Tout manquement à cette règle verrait l’action de mécénat requalifiée en parrainage. Tout abus pourrait aussi être interprété comme un acte de corruption destiné à obtenir des avantages dissimulés en échange de dons.
Des contreparties symboliques et discrètes sont néanmoins autorisées, à condition qu’il n’y ait pas de disproportion marquée entre le montant du don et la valorisation de la prestation. L’organisme bénéficiaire du don peut remercier son mécène, mentionner son nom et son logo dans ses supports de communication, offrir une visite d’atelier ou un avantage matériel modeste.
Le mécénat est ainsi un acte de solidarité désintéressé, sans attente de retour immédiat et direct en termes de visibilité, de réputation ou de ventes. Il peut néanmoins générer des retombées indirectes en termes d’image ou de notoriété.
Quelles sont les différentes formes du mécénat ?
Le mécénat peut prendre plusieurs formes. Le mécénat financier est la forme la plus utilisée par les entreprises, collectivités et administrations. Mais le don peut aussi être en nature ou de compétences.
Un mécène peut donner un bien (véhicule, mobilier, matériel informatique, équipements sportifs…) Il peut aussi proposer des prestations de service (imprimerie, livraison, réparation, graphisme…) ou mettre à disposition des compétences techniques, juridiques ou administratives.
Le mécénat de compétences offre aux salariés et agents la possibilité de s’engager pour une cause d’intérêt général sur leur temps de travail, tout en enrichissant leur expérience. Cette forme de don séduit de plus en plus les entreprises. Si 16 % des entreprises proposent aujourd’hui le mécénat de compétences, 20 % des mécènes le placent dans leurs priorités pour les deux années à venir.
Pourquoi mettre en place une politique de mécénat ?
Selon le dernier baromètre d’Admical. 172 000 entreprises pratiquent le mécénat en France, soit une augmentation de plus de 50 % en deux ans. Le montant des dons a été multiplié par 8 entre 2018 et 2023. Ces chiffres prouvent l’engouement des entreprises, collectivités et administrations pour le mécénat. Cet enthousiasme s’explique par les nombreux bénéfices du mécénat pour l’organisation.
1️⃣ Engager l’organisation dans la société
Le mécénat est un moyen pour l’organisation de s’ancrer dans des valeurs humaines et sociales. Il lui permet de contribuer à l’intérêt général de la société au-delà de ses seules activités économiques et administratives.
Le mécénat permet aussi à l’entreprise, la collectivité ou l’administration de s’ancrer localement dans son territoire, en soutenant un club sportif, une association locale ou un événement culturel. 88 % des mécènes font ce choix d’agir au niveau local ou régional. Renforcer l’ancrage territorial constitue la deuxième motivation des entreprises à s’engager dans le mécénat.
Avec le mécénat, l’entreprise, la collectivité ou l’administration joue un rôle sociétal. Elle sort de sa « tour d’ivoire » pour s’ouvrir à d’autres champs et s’humaniser.
2️⃣ Consolider la relation avec les parties prenantes
Les attentes des parties prenantes évoluent. Clients, usagers, administrés, investisseurs, fournisseurs, collaborateurs ou autres partenaires sont de plus en plus sensibles à l’engagement sociétal et environnemental des organisations.
Une politique de mécénat affirme la stratégie RSE de l’entreprise, la collectivité ou l’administration (responsabilité sociétale et environnementale). Elle lui permet d’agir concrètement pour le bien commun et l’intérêt général, tout en répondant aux attentes de ses parties prenantes.
En soutenant des causes d’intérêt général qui résonnent avec les valeurs de ses parties prenantes, l’entreprise, la collectivité ou l’administration sort de l’anonymat, séduit et se différencie. Ce sont autant d’atouts qui ouvrent le dialogue et favorisent les relations stratégiques ou commerciales.
3️⃣ Valoriser l’image de l’organisation
Le mécénat n’offre pas de rentabilité financière à proprement parler. Sa rentabilité est autre.
En soutenant des projets d’intérêt général, le mécénat véhicule une image positive de l’organisation. Elle lui permet d’incarner et d’afficher ses valeurs humaines, sociales et culturelles et de rassurer sur son éthique. L’expression des valeurs est d’ailleurs la première raison qui pousse les entreprises à s’engager dans le mécénat.
L’engagement de l’entreprise, la collectivité ou l’administration dans la société civile créé un sentiment de proximité. En soutenant des projets qui font sens, elle génère un capital social et de l’engagement autour de sa marque, en plus d’améliorer sa réputation.
4️⃣ Motiver, fédérer et fidéliser les collaborateurs
La politique de mécénat est un levier de motivation interne. Elle participe à renforcer la culture d’entreprise et l’esprit d’équipe.
Travailler dans une organisation qui s’engage crée un sentiment de fierté et d’appartenance. Le mécénat donne du sens aux actions quotidiennes des salariés et agents. La possibilité de participer concrètement aux actions de mécénat, en offrant du temps et des compétences, intensifie leur motivation et leur fidélité.
L’enthousiasme des salariés et des agents peut aussi attirer de nouveaux talents et faciliter les recrutements dans un marché de l’emploi tendu.
5️⃣ Bénéficier d’un cadre fiscal avantageux
Le mécénat bénéficie d’un dispositif fiscal favorable depuis la loi Aillagon du 1er août 2003 relative au mécénat, aux associations et aux fondations.
L’entreprise mécène peut déduire de son impôt sur le revenu ou sur les sociétés jusqu’à 60 % du montant des dons effectués, dans la limite de 20 000 euros ou de 0,5 % de son chiffre d’affaires hors taxe. Pour les dons au-delà de 2 millions d’euros, la réduction d’impôt est de 40 %. La déduction fiscale peut s’étaler sur cinq exercices comptables.
Pour les dons en nature ou en compétences, la valeur est calculée selon leur valeur de cession, leur valeur en stock ou au prix de revient de la prestation.
Ce mécanisme fiscal incitatif encourage le mécénat sans peser lourdement sur le budget des organisations.
Comment mettre en place une politique de mécénat efficace ?
Le mécénat peut être ponctuel et ciblé. Il peut aussi s’inscrire dans une stratégie de l’organisation. Une mise en place en 5 étapes garantit l’efficacité, la cohérence et la pérennité de la politique de mécénat.
1ère étape : définir les objectifs et les valeurs de l’organisation
Avant d’engager une politique de mécénat, l’entreprise, la collectivité ou l’administration doit se poser une question essentielle : pourquoi souhaite-t-elle s’engager dans le mécénat ? Quelles sont ses valeurs fondatrices ? C’est l’occasion de s’interroger sur l’éthique, l’histoire, la mission et la raison d’être de l’organisation, mais aussi sur les profils de ses partenaires et clients afin d’entrer en résonance avec eux.
L’objectif est de s’assurer que les actions de mécénat sont cohérentes avec la stratégie de l’organisation, sa culture d’entreprise et ses engagements en matière de RSE.
Cette étape s’accompagne aussi de questions financières, avec l’allocation d’un budget dédié au mécénat.
2ème étape : identifier les causes d’intérêt général à soutenir
Une fois les objectifs fixés, la deuxième étape consiste à sélectionner les causes et projets à soutenir.
L’organisation peut choisir de se spécialiser dans une seule cause d’intérêt général ou investir dans plusieurs projets. Il est cependant conseillé d’éviter le saupoudrage afin de pouvoir réellement contribuer à chaque projet et garantir la clarté de la démarche et des messages.
Les entreprises, collectivités et administrations mécènes doivent veiller à choisir des causes d’intérêt général qui résonnent avec leur identité et les attentes de leurs parties prenantes (clients, collaborateurs, investisseurs, partenaires publics et privés, etc.) Il peut aussi être intéressant d’impliquer les salariés ou agents dans le choix des projets soutenus pour favoriser leur adhésion et leur mobilisation.
Il est enfin important de s’assurer de la transparence et de la crédibilité des organismes bénéficiaires et de l’utilisation des dons. Celles-ci doivent respecter trois critères : avoir une gestion désintéressée ; ne pas exercer d’activité lucrative ; bénéficier à un cercle non-restreint de personnes.
L’erreur serait de soutenir une cause inappropriée pour « faire plaisir » à un partenaire, un ami, un membre de la famille ou une connaissance. Cela pourrait aussi soulever la question de la corruption.
3ème étape : mettre en œuvre concrètement la politique de mécénat
Le mécénat doit se traduire par des actions concrètes, que ce soit des dons financiers, des dons en nature ou des dons en compétences des salariés et agents.
Qu’elles soient ponctuelles ou de longue durée, les actions sont à structurer, en définissant des modalités claires et en veillant à ce que les projets soutenus soient rigoureusement suivis. Si elle n’est pas obligatoire, la convention de mécénat formalise les engagements respectifs, précise la nature et les modalités des dons et prévient les litiges.
La politique de mécénat peut être gérée en direct par l’entreprise, la collectivité ou l’administration. La gestion peut aussi être confiée à une structure indépendante externe avec un budget dédié (fondation d’entreprise, fondation reconnue d’utilité publique, association, fonds de dotation,…)
4ème étape: communiquer sur la politique de mécénat
Communiquer sur sa politique de mécénat permet à l’entreprise, la collectivité ou l’administration d’accroître les retombées internes et externes en termes de réputation et d’image.
Si le bénéficiaire du don est bridé pour valoriser l’engagement de son mécène, ce dernier a les mains libres pour communiquer sur sa politique de mécénat.
L’entreprise, la collectivité ou l’administration peut communiquer dans ses supports de communication internes ou ses réseaux sociaux, présenter les projets soutenus sur son site internet et son rapport d’activité annuel ou encore organiser des événements pour mettre en lumière les initiatives de mécénat.
5ème étape : évaluer et ajuster
Comme pour tout projet, il est important de mesurer l’impact des actions de mécénat pour en vérifier l’efficacité et la pertinence et la bonne utilisation des dons.
Les indicateurs peuvent porter sur l’adéquation entre investissements et retombées en termes d’image et d’engagement. Les outils de gestion et d’évaluation permettent de s’assurer de l’atteinte – ou non – des objectifs pour ajuster la stratégie de mécénat si nécessaire : retrait ou renforcement d’un partenariat, augmentation ou réduction d’un don financier, changement de la forme du don en don financier, en nature ou en compétences, etc.
La politique de mécénat affirme l’engagement sociétal des entreprises, collectivités et administrations. Bien plus qu’un acte philanthropique, le mécénat crée des liens durables avec les parties prenantes et valorise l’image sur le long terme. Il est désormais un pilier de la stratégie des organisations dans un contexte où la responsabilité sociétale et environnementale (RSE) devient un critère d’investissement, d’achat et de partenariat. Pour les entreprises, collectivités et administrations mécènes, il ne s’agit pas uniquement de donner de l’argent, du matériel ou des compétences. Il s’agit de participer activement à la transformation de la société, au service de l’intérêt général.
Pour aller plus loin et sécuriser leurs pratiques, les entreprises, collectivités et administrations peuvent se référer au guide 2024 de l’Agence Française Anticorruption (AFA) intitulé « Sécuriser les opérations de parrainage et de mécénat des entreprises ».
(1) Source des chiffres : baromètre du mécénat d’entreprise 2024 publié par l’expert du mécénat Admical : https://admical.org/contenu/barometre-du-mecenat-dentreprise-2024